Quand un simple conflit tourne à la guerre ouverte, il est temps de revoir sa façon de communiquer
Pourquoi la communication sans violence est toujours plus efficace
Quand on se dispute, bien souvent, on dit que « les mots dépassent la pensée ». Avec l’énervement, on veut tellement faire passer son point de vue et que l’autre reconnaisse qu’il a tort, qu’on a tendance à exagérer le message : mots excessifs, intonation acerbe, gestuelle agressive.
Évidemment, cela ne permet que rarement d’atteindre l’objectif, bien souvent cela ne fait qu’envenimer la situation. On se retrouve alors dans une situation dans laquelle non seulement notre point de vue n’est pas passé, mais en plus il va falloir rattraper les conséquences de ce que l’on a dit ou fait pendant cette dispute. Au lieu de résoudre la tension, on ne fait qu’accumuler les conflits annexes et les ressentiments.
Il faut alors se poser la question : est-ce une relation que je souhaite conserver ?
Époux, épouse, ami, employeur… Si la réponse est oui, il est important de ne pas entrer dans une escalade verbale qui risque d’abîmer la relation à long terme.
Si la réponse est non, à vous de voir jusqu’à quel point avoir raison est important.
Communiquer sans violence ne veut pas dire se laisser écraser
On croit souvent à tort que ne pas monter dans les tours, cela signifie forcément que l’on «s’écrase», que l’on perd la partie et donc que l’on donne raison à l’autre. C’est pourtant complètement faux. La personne qui s’énerve n’arrive pas à faire passer son point de vue, ses idées, car l’émotion prend le pas sur la réflexion. En restant calme, il est bien plus facile d’élaborer sa pensée et donc de pouvoir s’affirmer sans dire n’importe quoi. On garde ainsi de meilleures chances de se faire comprendre correctement.
Vous avez certainement déjà remarqué que lorsque deux personnes se disputent avec agressivité, rapidement le ton monte, on pense que parler plus fort que l’autre donne forcément raison, comme si on voulait atteindre une sorte de KO de la pensée. Alors qu’une personne qui reste calme et froide en face de celui qui s’énerve va permettre à la tension de descendre et donc laisser une chance au dialogue de s’instaurer.
Les 4 principes de la communication sans violence
La communication non violente repose sur 4 grands principes :
L’observation : observez la situation de la façon la plus objective possible, sans critiquer ou accuser, pour faire la part des choses entre ce que vous voyez, ce que vous entendez et ce que vous imaginez. Exemple : votre responsable n’a pas mis votre nom sur le rapport qu’il a rendu à la direction et pour lequel vous avez fait un gros travail en temps qu’assistant. Ici l’observation sera seulement : le travail effectué et la remise du rapport sans le nom.
Les émotions : ce que vous ressentez par rapport à ce que vous observez. Faire la distinction entre ce que l’on ressent, ce que l’on pense de soi et ce que l’autre doit penser de nous pour agir ainsi. « Je suis déçu et en colère qu’une part de mon travail ne me soit pas attribué » au lieu de « j’en ai marre qu’il me prenne pour un idiot et qu’il me manque de respect ! ».
Les besoins : il faut identifier les raisons, parfois cachées, qui font que la situation vous blesse particulièrement. Ici ce serait : j’aimerais être reconnu, valorisé pour mon travail.
La demande : formuler la demande sans accuser, sans agresser. C’est ce que vous souhaiteriez faire ou mettre en place pour résoudre le conflit. Il faut utiliser des mots positifs, en parlant de soi uniquement. « j’ai travaillé sur ce rapport également, j’aurais souhaité que cela soit indiqué sur le travail que tu as rendu, j’apprécierais que cela soit le cas la prochaine fois que nous travaillerons ensemble ».
De cette façon, le dialogue n’est pas coupé et cela permet à votre interlocuteur :
- soit de comprendre ce que vous lui reprochez et en quoi la situation a pu vous affecter,
- soit d’éclaircir la situation avec une information que vous ne connaissiez pas. (par exemple ici : « la direction utilise un système de gestion informatique qui ne permet de mettre qu’un seul nom sur le rapport. La prochaine fois nous mettrons ton nom si tu veux »).
Concrètement, comment mieux désamorcer une dispute ?
Éviter les mots définitifs : toujours, jamais,… « Tu es toujours en retard, tu ne préviens jamais ! ». Vraiment jamais ? La personne accusée percevra forcément l’excès et la mauvaise foi, elle va se braquer et rejettera l’argument en intégralité. « Ce n’est pas vrai, je préviens parfois » = l’autre dit n’importe quoi, ça ne sert à rien de discuter. En reformulant par : « tu es en retard, j’aurais aimé que tu prévienne… », on remet la situation dans le contexte et on se concentre uniquement sur l’événement qui a déclenché la dispute.
Parler des sujets qui fâchent quand tout va bien: ça peut paraître contre intuitif car on a tendance à vouloir éviter les sujets de tension quand on est dans une période où tout va bien avec celui ou celle avec qui on a un compte à régler. Pourtant, c’est dans ces moments que l’on est dans les meilleures dispositions : calme, dialogue possible, possibilité d’élaborer la pensée sans être submergé par les émotions négatives,… Évidemment, il convient de choisir ses mots : parler de ses propres ressentis au lieu des actions de l’autre. Exemple, « j’aimerais qu’on reparle de l’autre jour, tu m’as vraiment pris pour un idiot en arrivant en retard sans prévenir, j’en ai marre que tu ne pense jamais à moi » pourra être remplacé par « j’aimerais qu’on reparle de l’autre jour, quand tu es arrivé en retard, j’étais vraiment inquiet en t’attendant… Est-ce que la prochaine fois tu pourrais juste m’envoyer un message ? »
Faire une pause, quitter la pièce : quand on sent l’escalade arriver, il est important de faire une pause pour casser la dynamique. Avant de répondre, prenez quelques profondes respirations ou quittez la pièce un instant pour laisser retomber la pression. Cela permettra de reprendre la discussion avec un niveau de tension plus bas en revenant.
Écouter vraiment ce que dit l’autre : dans une dispute, on tique souvent sur ce que l’autre dit au détour d’une phrase et on ne le laisse même pas terminer, on contre-attaque sur l’argument lâché en cours de route. En parlant à tour de rôle, on se donne plus de chances de mieux comprendre ce que l’autre exprime. « Je te laisse parler sans t’interrompre, explique-moi ce que tu veux dire et ensuite je ferai pareil ».
Respecter la façon de communiquer de l’autre. Si vous vous trouvez face à une personne qui a du mal à exprimer ce qu’il ressent, inutile de chercher à obtenir une réponse là, tout de suite. « Mais enfin, tu vas répondre oui ? Pourquoi tu ne me dis pas ce que tu penses vraiment ? Hein ? Tu ne réponds pas ? J’en ai marre à la fin !». Laissez-lui le temps. « OK, si tu ne veux pas répondre maintenant, je te laisse le temps de réfléchir, on pourra en reparler quand tu te sentiras prêt ».
Ne pas penser à la place de l’autre. Toutes les phrases qui commencent par un jugement ou une pensée que l’on impose à l’autre ne fait que mettre de l’huile sur le feu et supprime toute chance d’établir un dialogue constructif. « Écoute, je sais que tu es énervé, mais… » ; « Je trouve ça vraiment hypocrite de ta part de me dire que… ». Parlez uniquement de la seule chose que vous maîtrisez un peu, ce que VOUS ressentez ou ce que VOUS pensez.
Une très grande majorité des conflits et des disputes est due à un problème de communication, un décalage entre ce que l’on dit et ce que l’autre comprend.
Comme l’a formalisé l’écrivain Bernard Werber :